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Le blog de Menon
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5 mai 2020

Le ravissement de Lol V. Stein de Marguerite Duras

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Roman de la dépersonnalisation, à la limite de l’étude clinique, le Ravissement de Lol V. Stein est un livre étrange servi par une écriture expérimentale.

L’histoire met en scène Lol. Un soir, au bal du casino, l’homme qu’elle aime la délaisse pour aller danser avec une autre ; Lol craque et traverse un épisode psychotique. Au cours de sa nuit de délire, elle fera connaissance de son futur mari. Elle déménage et lui donne des enfants, mais le métier de son époux la conduit à revenir dans la ville de sa jeunesse, là même où elle bascula. Elle retrouve Tatiana, son amie d’enfance et fait la connaissance de son amant dont elle s’éprend.

Sur le site de Gallimard, on apprend que Marguerite Duras est avec le Ravissement « dans la certitude » d’avoir « fait un livre impubliable. Pourtant, Le Ravissement de Lol V. Stein paraît dans la Blanche le 25 mars 1964 et connaît tout de suite un beau succès de librairie, même si la grande presse rend compte à la fois d’un malaise et d’une incompréhension. », nous fait savoir le site de l’éditeur. Incompréhension ? Il y a de quoi, puisque « Duras s’efforce de faire tomber tout un théâtre de mots dans une prose hallucinatoire, flottante, insaisissable. » « Elle ne sait pas où elle va, la frontière même entre ses personnages lui devient poreuse, certaines voix interchangeables. » Très logiquement, un psychanalyste comme Jacques Lacan s’enthousiasma.

Aujourd’hui, cinquante-six ans après sa parution, le Ravissement continue de fasciner. Le roman n’a rien de facile. Ce n’est qu’à la troisième lecture que je l’ai enfin correctement compris – à moins de lui réserver un accueil attentif avec une lecture lente et respectueuse, on s’y perd. A la différence d’un Maupassant qui excellait dans la peinture clinique tout en proposant une histoire parfaitement lisible, Duras, à l’instar d’une littérature née dès 1930 avec des auteurs comme Joyce ou Faulkner, s’essaye à la destruction du roman bourgeois – on brise les codes d’écriture pour travailler sur le matériau même. Ce n’est plus l’histoire qui prime, mais la façon de la raconter – et plus elle déconcertera et mieux ce sera !

Pour ma part, Un barrage contre le pacifique m’aura semblé nettement plus réussi. Ici, on semble avoir à faire à une certaine anorexie littéraire. Dans les premières pages du livre, Duras nous fait savoir que Lol est tout en os – il semblerait que la métaphore vaut pour qualifier le livre : un squelette mais pas de chair. Bref, une expérience troublante, assurément.

 

Le ravissement de Lol V. Stein de Marguerite Duras (Gallimard, 192 pages, 6,30 euros)

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