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31 juillet 2019

Souvenirs de la maison des morts de Fédor Dostoïevski

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Dans quelle mesure Souvenirs de la maison des morts retrace ce que Dostoïevski a véritablement vécu lorsqu’il fut incarcéré au bagne pour s’être commis avec un groupe révolutionnaire socialiste ? Difficile de répondre à une telle question puisque ce roman n’est pas une autobiographie, mais se présente comme une œuvre de fiction : le narrateur fait la connaissance d’un homme vivant comme un reclus et dont il découvre qu’il a connu le bagne après avoir assassiné sa femme ; cet ancien condamné ayant consigné ses souvenirs de forçat, le narrateur en donne lecture. Voilà ce qu’oublient tous ceux qui parlent de ce livre dont ils assurent qu’il rapporte la propre expérience concentrationnaire de Dostoïevsi. Or, rien n’est moins sûr.

La force de Souvenirs de la maison des morts de Fédor Dostoïevski tient à la façon immersive dont il rapporte la vie en camp. C’est bien simple : on a la sensation de se trouver présent au milieu des bagnards et d’entendre leurs conversations, de suivre leurs rodomontades, des les voir manger ou se disputer.

C’est à une sorte d’aristocratie des bas fonds que nous confronte Dostoïevski, les prisonniers vivant comme des sortes de noble sans terre, sans titre, mais dont la prison constitue le domaine partagé. Au-delà des crimes qui leur ont valu incarcération, il parait parfois difficile de les séparer d’un autre homme du peuple ou de la noblesse tant ils ressemblent à tout russe de cette époque, à la fois flamboyant et misérable, noble et ridicule.

Néanmoins, malgré les qualités littéraires évidentes dont fait preuve l’auteur, ces Souvenirs de la maison des morts peinent souvent à nous passionner. Se perdant dans des récits somme toute anecdotique, Dostoïevski n’arrive pas à signer le grand roman dont il aurait pu accoucher comme il accoucha d’œuvres fortes comme Crime et châtiment ou les Frères Karamazov. Mais sans doute le propre de l’anecdote, ici même, n’est-elle pas de nous donner à voir les choses vues et vécues par Dostoïevski qu’il se complait à rapporter comme s’il émanait d’un autre ? A mon sens, les Souvenirs de la maison des morts constituent bel et bien son autobiographie à peine romancée. (Si un lecteur avisé a quelque connaissance sur ce sujet, qu’il se sente volontiers invité à me faire part de son point de vue sur la question.)

 

Souvenirs de la maison des morts de Fédor Dostoïevski (Gallimard, 512 pages, 9 euros)

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