Dissertation du Pape Pie VI sur le meurtre de D. A. F. de Sade
Extrait de son roman Juliette, cette « dissertation » commence sous les meilleurs auspices. Par l’intermédiaire du Pape, Sade délivre un superbe texte de métaphysique panthéiste de type oriental qui rappelle la Bhagavad-Gita, à savoir que l’Etre essentiel, c’est l’univers et que ce dernier ne détruit ni ne crée rien mais recycle sans fin les être qui l’habitent. Voilà pourquoi, explique le Pape/Sade, tuer n’est pas un crime mais simplement une relance de la machine à produire des êtres. Mieux, même : tuer favorise la nature, lui ouvre la possibilité de nouvelles créations… Jusque-là, tout allait bien, si j’ose dire. L’immoralisme de la dissertation est bien problématique mais on peut comprendre Sade. Tout déraille lorsque, soudainement, ce dernier s’emploie à un saut de logique ô combien désespérant. Puisque tuer est bon pour la nature, pourquoi ne pas torturer et jouir de cette torture ? Et Sade de déballer un inventaire à la Prévert d’une longueur hallucinante et qui répertorie, sur des pages et des pages, toutes les pires horreurs dont on savait l’humanité capable à son époque en terme de massacre immonde. Car oui, cela le fait jouir. Et alors, toute la métaphysique panthéiste s’effondre : toute cette poésie taoïste pour accoucher d’une liste de torture ? Sade, métaphysicien ? Presque, mais ce n’est pas brillant.