De la liberté du Chrétien de Luther

On oubliera, dans cette édition, l'introduction – médiocre – et le commentaire philologique final – tout aussi médiocre. L'auteur a ainsi le don d'embrouiller et de rendre illisible les textes introductifs de Luther à plusieurs Livres de la Bible alors que Luther écrit avec une simplicité et une intelligence qui rendent ces écrits précieux.

Au fondement de tout ce que pense Luther, il y a la Foi et la Grâce. Croire est une liberté, la Grâce un don. Celui qui croit est libre. Libre parce qu'il est mort et ressuscité en Christ... cette liberté l'autorise à ne plus oeuvrer. C'est que la croyance au Christ opère une métamorphose intérieure rendant caduque la notion même d'effort. Contre l'Epitre de Jacques et résolument du côté de Saint Paul, Luther n'envisage pas la piété comme une pratique puisque si la pratique n'a pas d'assise alors elle est sans fondement et donc corrompue. A contrario, c'est la Foi et le don de la Grâce qui rendent bon les actes de l'Homme et lui assure la vérité du geste.

Ainsi de la Loi de Moïse : elle est ambigüe ; révélée, elle fonde le pêché puisque tout son principe est de lutter contre. Par un effet paradoxal, elle est donc manifestation de la sainteté et en même temps du mal. Elle révèle ce qui était caché. En découle le fait que, désormais, celui qui suit la Loi est assujetti à Elle et prisonnier de ses multiples Commandements ; en découle l'impossibilité de la réaliser et donc, immanquablement, le pêché. Or, le Christ a réalisé la Loi en lui. Le suivre, méditer sa Parole et son Enseignement, c'est vivre pleinement la Loi. La Loi n'est donc pas abolie mais ne peut exister désormais que sous la forme de la Foi, de la prière et de la Grâce. Il s'agit de réaliser en soi la Loi ; qu'elle ne soit plus extérieure, mais intérieure.