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Le blog de Menon
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8 février 2008

Netotchka Nezvanova de Fédor Dostoïevski

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Il y a dans Netotchka Nezvanova de Fédor Dostoïevski toute une structure perverse que le romancier russe n’a, à ma connaissance, jamais osé réutiliser. Roman inachevé à cause de son envoi au bagne pour cause de participation à un cercle fouriériste (mouvement socialiste), Netotchka Nezvanova met en scène une fillette amoureuse de son beau-père, alcoolique et musicien raté. On se surprend à découvrir tout le mécanisme du complexe oedipien sous la plume de Dostoïevski, avec un grand sens de la psychologie, et on songe aussi au jeu de mot de Jacques Lacan, la Père version (pour Perversion) car le beau-père de Nétochka a un comportement suspect vis-à-vis d’elle et abuse de cet amour dont il ne se rend peut-être pas compte, mais qui lui sert pour contraindre la fillette à voler sa femme.

 

Néanmoins, force est de constater que si le père a un rapport pervers à sa belle-fille, ce rapport est normalisé et justifié par l’alcoolisme. Jamais le père ne se permet le moindre geste déplacé vis-à-vis de sa fille. S’il se sert de l’amour que cette dernière lui porte comme d’un moyen de pousser Netotchka à voler sa femme, il reste clairement étranger à la question du désir sur son enfant. Par contre, la petite fille a une structure profondément inquiétante : elle affirme et revendique l’amour porté à son père et l’opposition formulée contre sa mère.

 

Néanmoins, les choses ne sont sans doute pas aussi simples qu’il n’y paraît de prime abord. En effet, le récit est raconté de longues années plus tard, par une Netotchka devenue adulte qui relit les événements d’alors : il serait alors nécessaire de s’interroger sur ce surcroît d’honnêteté et se demander de quel point de vue est réellement raconté le récit : de la fillette ou de la femme ? Les événements décrits sont-ils bien contemporains ou des recréations magnifiées par les années ? Netotchka, la femme, reconnaît-elle le complexe d’Œdipe de son enfance ou bien imagine-t-elle ce qu’elle a vécu ? On peut en effet se questionner sur l’attitude du père. Qui est le plus pervers des deux ? Celui revendiquant son désir pour l’autre ou celui feignant de ne pas se savoir objet de désir d’une enfant ?

 

Le roman se poursuit après le drame familial et Netotchka vit désormais dans une maison noble. L’occasion pour l’auteur de pousser encore plus loin le degré de perversité de son héroïne. Ainsi la voit-on – modèle du nihiliste russe épinglé par André Glucksmann dans son Dostoïevski à Manhattan – bouleverser une fillette de son âge dont elle fait son amante, créant un chambardement dans une maison calme et rangée et éveillant chez chacun des sentiments contradictoires et tendus. La façon extrêmement choquante avec laquelle l’auteur prend fait et cause pour son héroïne alors même que cette dernière se comporte comme un monstre de perversion rend malsaine la lecture. La scène d’amour entre les deux petites filles, véritable moment pédophile, finit de faire de cette seconde partie un écrin de barbarie.

 

Heureusement, les choses se terminent bien mieux. De nouveau recueillie dans une troisième famille, Netotchka change tout à fait de personnalité et découvre un secret liant le couple s’occupant d’elle. La structure perverse est toujours lisible, mais cette fois-ci l’héroïne n’a plus rien de la tentatrice de la seconde partie. La raison n’est guère difficile à concevoir : le roman a été abandonné par deux fois et les reprises par Dostoïevski correspondent sans doute aux fins de chapitres. L’auteur fait alors montre d’un sens de la psychologie, d’une maîtrise des scènes dramatique et d’une capacité à inféoder la partie enquête policière de son livre au drame bourgeois qui émerveille.

 

Pour conclure, on dira de ce livre inachevé (mais dont on peut se contenter néanmoins de la fin) qu’il ne compte pas parmi les œuvres majeurs de l’auteur qui l’avait pourtant en grande estime. La première grande œuvre envisagée par Dostoïevski a échoué de par les vicissitudes de sa vie. N’en reste pas moins que cet ouvrage inquiétant et malsain donne à voir en action les thèses freudiennes et girardiennes. Désir oedipien, complexe du double, désir mimétique… troublant, troublant roman qu’on ne mettra pas en toutes les mains. Il pose en tout cas la question du regard : car l’auteur joue constamment du rapport malsain/innocent vu par le lecteur. On ne sait plus au final si c’est nous qui hallucinons le désir malsain ou si la fillette charrie des désirs d’adulte dans son sillage.

 

Actes Sud, 8,50 euros.

 

 

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Commentaires
R
j ai lu ce livre à 10 ans chez ma grand mère pendant les vacances ,le livre n' avait plus de couverture ni de nom d auteur, seulement le titre "âme d enfant",Il m a enchantée ,adulte je l ai fait relier sans en savoir l auteur je l ai relu et trouvé d une grande poésie;finalement il y a quelques années j ai su l auteur et j ai achete le livre qui m a toujours autant plu .
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L
La gloire Menon,je vous annonce la vraie gloire!,un brave traducteur d'Ekaterinebourg,Russie a traduit vos deux merveilleuses critiques sur Dosto en russe ,et a envoié le tout à quelques sommités de la litterature Russe et méme ailleurs ,c'est à dire à tout ce que ce petit monde compte de russophones et de slavophiles et vous les EBLOUISSEZ avec votre morale de répresentante de Tupperware ou de conseillére en tampons hygiéniques!!! brave Menon bigorneau du blog.Dire que j'ai mis un an pour convaincre un editeur suedois à publier tout Cioran et vous,vous étes traduit en Russe en 24 heures!:c'est la gloire rapide comment on l'aime de nos jours,bravo bigorneau!Je vous rassure(j'y tiens)vous étes NORMAL et vous avez une ame admirable mais surtout NORMALE.Et c'est bien votre belle ame!,elle ruisselle de normalité,pétrie de normalité,transfigurée par la normalité vous étes un étre absolument normal:ne vous frottez pas à nous,fascistes de la pensée!comme disait Ernest Pinard le procureur qui a requis contre Baudelaire:"il n'est pas normal cet homme il faut le chatier"vous voiez,vous étes comme Pinard,normal!.On décéle dans votre réponse une dimension de SOUMISSION évidente(quelqu'un vous fouette?déposez plainte c'est ultra-moderne)Quand vous n'aimez pas vous étes miévre et tiéde(le Christ haissait les tiédes!)et quand vous aimez vous basculez abruptement dans la SOUMISSION;vous avez des structures mentales de GRAND SOUMIS,bravo Minus Menon,vous étes donc Célébre,Cretin,Soumis et merveilleusement prévisible jusqu'à l'agonie(attention,vos deux neurones ont légerement bougé!!!).Je vous salue avec un énorme plaisir, immense méme,(mais si,mais si vous le méritez, ne vous dépreciez pas bigorneau un peu de dignité).Je n'ai jamais croisé quelqu'un de plus normal et cela jusqu'au vomissement(le votre bien sur).Pondez-nous un de vos textes sur LA SOUMISSION et ce sera LA GLOIRE bigorneau!Laissez ces textes longtemps ici,j'adore çà!accrochez-vous à votre blog bigorneau et poursuivez votre destin d'anesthesiste dans le grand MOUVEMENT de la CONNARDISATION COSMOPOLITE,à vous lire,bigorneau
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M
Nous sommes biens d'accord sur le diagnostique.
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D
Cette personne croit qu'elle va faire une conférence en Suisse, alors qu'elle a rendez-vous avec des psychiatres, probablement pour recevoir elle-même des soins, dont on espère qu'ils seront efficaces.
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M
Manifestement, vous ne supportez pas la critique et souffrez de bouffées de Haine. Pauvre et petit fasciste de la pensée...<br /> <br /> Je préfère donc rester médiocre et éloigné de vous, sinistre personnage qui vous apparentez à ces inquisiteurs sadiques qui jouissent de leur sois-disante supériorité et se font un plaisir d'humilier et de manifester une auto-satisfaction dégueulasse.<br /> <br /> Je laisse votre message pour que tous les visiteurs qui passent voient à quel genre de délirant personnage on peut être confronté lorsque l'on écrit sur Internet. <br /> <br /> Quel beau cas de pathologie mentale vous nous donnez là à voir ! Croyez bien que je me félicite de votre message dont l'insupportable médiocrité éclaire ma journée : toutes les fois où je douterais de la bonne santé de mon âme, je n'aurais qu'à vous relire pour vérifier à quel point je suis loin de sentir mauvais.
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